07/02/2018 - Un oeil sur les médias
Plana Radenovic est journaliste à La Voix du Nord depuis 2012. Spécialiste faits divers, justice, prisons, elle est passionnée de ces thématiques, « de ce monde-là qui n’est rien d’autre que la vie dans ce qu’elle a de plus brut et de plus sensible ». Formatrice à ESJ PRO, semi-marathonienne et geek sous perfusion (@plarad sur Twitter), elle est également auteure de « Ta vie en éclats » (Editions Michalon), roman vrai de sa mère décédée.
Prochainement, elle animera la session de formation Le live-tweet et la couverture d’un procès. Elle revient sur ce nouveau genre d’écriture journalistique.
A quoi et à qui sert un live-tweet lors des audiences au tribunal ? Quelle valeur ajoutée pour un journal ?
Un live-tweet (LT) est une nouvelle forme d’écriture de la chronique judiciaire. Il ne remplace pas le compte-rendu « classique », mais il apporte autre chose, une impression d’être là, dans la salle d’audience, et de suivre le procès en direct, au fil des déclarations rapportées par le journaliste et de ses observations. Il permet aussi d’intéresser à la justice tout un public qui n’est pas forcément familier des chroniques judiciaires dans le journal papier. Un bon LT agrège une audience, qui suit alors le procès comme on suivrait une histoire racontée en direct.
La valeur ajoutée, outre la diversification du lectorat, est aussi la possibilité de rendre compte d’une audience de manière beaucoup plus complète et précise que dans le cadre contraint du papier, avec un nombre de signes limité, où il est évidemment impossible de rendre compte de la totalité d’une audience. Cela peut permettre à la fois aux lecteurs papier, alléchés, d’en savoir plus en déroulant le « thread » du LT, et aux lecteurs-internautes de s’intéresser aux papiers du média pour lequel le journaliste twitto travaille. Evidemment, dans un LT, il faut bien sûr renvoyer vers les papiers sur le site web du journal.
En quoi cet exercice nécessite-t-il des compétences particulières ?
Comme pour le genre journalistique du portrait, où il ne suffit pas de raconter ce qu’on sait ou ce qu’on a appris sur une personne, comme pour la photo où il ne suffit pas d’appuyer sur le déclencheur, le LT est un exercice journalistique à part entière, qui obéit ainsi à certaines règles. Tout d’abord, je ne conseille pas de LT via le clavier minuscule de son smartphone, mais à travers un ordinateur portable, afin de pouvoir ouvrir Tweetdeck et rendre le LT interactif. Comme d’autres genres, donc, le LT a ses propres codes à maîtriser. Mais il suppose aussi d’être familiarisé avec les notions judiciaires, comme pour l’écriture d’une chronique « classique ». C’est pourquoi toute formation sur le LT est précédée de rappels sur le vocabulaire de la justice et sur le droit de la presse, dont le LT n’est évidemment pas exempt.
Comment peut-on s’imprégner de l’ambiance d’un procès et tweeter en même temps ? Peut-on être un bon chroni-twitteur ?
J’aime bien le mot. Oui, je pense que l’on peut s’imprégner de l’ambiance d’un procès tout en twittant. On peut bien le faire en prenant des notes. Cela suppose une gymnastique et une concentration supérieures à celles d’une chronique judiciaire « classique », que l’on laisse décanter pour écrire le soir. mais un bon chroni-twitteur, comme vous dites, sait déceler assez rapidement l’intérêt d’une citation, ou d’un moment d’audience. En suivant le fil d’un LT d’ailleurs, on peut sentir l’ambiance qui se crée.
Un bon chroniqueur, twitto ou pas, est aussi un bon observateur. Il va savoir restituer les détails visuels importants justement pour rendre compte de l’ambiance. Par ailleurs, un LT n’est pas la seule retranscription de phrases entendues, mais il laisse la place à l’explication, à l’analyse, et pourquoi pas au commentaire. C’est aussi un bon moyen d’être proche du lecteur, qui souvent pose des questions, formule des observations, en lui répondant en direct. Encore un plus par rapport au papier.
Interview réalisée par Alexandre Lenoir, journaliste, formateur ESJ PRO
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