17/03/2015 - Un oeil sur les médias
Vous avez un projet de documentaire, mais vous ne savez pas comment vous lancer. Joëlle Stechel, documentariste, encadrera la formation « Le documentaire, du journalisme à la réalisation » du 9 novembre au 18 décembre 2015. Dans cette interview, elle vous donne plusieurs conseils pour passer de la simple idée à l’écriture d’un sujet, pour trouver des pistes de financements, et ne louper aucune étape lors de la réalisation.
Quels sont les requis pour suivre la formation « Le documentaire, du journalisme à la réalisation » ?
Pour pouvoir suivre cette formation, il faut :
- avoir suivi un cursus de formation au journalisme et/ou avoir une expérience professionnelle dans un média de presse écrite ou audiovisuelle,
- avoir déjà une (ou des) idée(s) de projet documentaire.
Durant cette formation, les stagiaires auront à produire un documentaire d’environ 13 minutes. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?
Ce documentaire sera une ébauche d’un projet plus ambitieux (52 minutes). Il permet aux stagiaires de se frotter aux spécificités de l’écriture et de la réalisation de documentaires. Il servira de « carte de visite » pour démarcher ensuite des producteurs et des diffuseurs.
Pour réaliser ce 13 minutes, les stagiaires sont suivis en permanence depuis la conception du projet, son repérage, l’écriture du synopsis, de la note d’intention jusqu’au tournage, au montage et à la postproduction (mixage, étalonnage, enregistrement des commentaires, etc..).
Cette ébauche peut prendre la forme d’un « résumé » présentant le projet, les personnages, les enjeux ou celle de séquences fortes qui permettent déjà d’affirmer un regard, un point de vue, des intentions de réalisation.
Quelles sont les étapes à suivre pour réussir à passer d’une idée de documentaire à un sujet parfaitement anglé ?
On ne parle pas d’angle en documentaire mais d’intention. Il s’agit ici, contrairement au journalisme, non pas de couvrir de façon objective et exhaustive un événement, une histoire mais au contraire d’affirmer un point de vue singulier, subjectif sur cet événement, cette histoire.
Les différentes étapes sont :
- La réflexion (avec le formateur) sur le sujet choisi, sur sa faisabilité, sur son intérêt, sur la possibilité ou non de le traiter en format long, ainsi que la réflexion sur la réalisation (qu’est-ce que je vais choisir de filmer dans cette réalité, qu’est-ce qui m’intéresse, comment je vais le montrer, quel va être mon positionnement de réalisateur par rapport à la posture journalistique ?)
- Le repérage : l’immersion dans le milieu que l’on va filmer, le choix des personnages qui vont incarner la narration, le choix des lieux, la confirmation du mode de narration et de l’écriture audiovisuelle (par exemple, le choix entre la de caméra posée ou des plans séquence en adéquation avec ce qu’on est en train de filmer.)
- L’écriture du dossier qui comprend la rédaction du synopsis et de la note d’intention. L’écriture documentaire a ses spécificités : l’implication du réalisateur qui n’est pas « neutre », la présentation des personnages, des lieux et des enjeux dramaturgiques, la conduite d’une narration qui donne envie d’en voir/savoir davantage.
Le pitch : quels sont les erreurs à éviter lors que l’on présente son projet auprès de décideurs ?
Difficile de répondre à cette question. C’est vraiment du cas par cas. De manière très générale, il faut défendre son projet tel qu’on l’a rêvé, imaginé, écrit. Le documentaire, c’est aussi assumer sa singularité, l’originalité d’un regard. Et si on est à rebrousse-poil par rapport à ce que diffusent aujourd’hui les chaînes, on doit savoir rester à l’écoute d’éventuelles suggestions.
Côté financement : quelles sont les premières démarches à effectuer pour trouver des aides et subventions ? Y a-t-il des partenaires incontournables à solliciter ?
La première étape est de trouver un producteur. L’aval du producteur va déclencher les aides (CNC, etc..) et ouvrir les portes des diffuseurs. La réalisation est un métier, la production un autre.
Cela dit, on peut essayer de produire par des circuits différents (demandes de subventions aux régions, aux collectivités régionales, présentation de projet à la SCAM dans la section « Brouillon d’un rêve », etc..). Mais, très souvent, tous ces financeurs vont réclamer l’engagement d’un producteur pour débloquer d’éventuelles aides. Reste Internet et l’appel au financement des internautes.
Lors de la collecte d’informations puis durant le tournage, quels seraient, selon vous, les conseils essentiels à donner à un journaliste qui se lance dans la création d’un documentaire ?
- Décentrez-vous de la posture de journaliste omniscient et …pressé,
- Mettez-vous à l’écoute des personnages, des paysages, de l’histoire, à votre propre écoute,
- Donnez-vous le temps de la rêverie, de l’imaginaire, de l’association libre,
- Osez sortir du carcan des images télévisuelles que nous avons tous en tête,
- Allez chercher votre propre langage en images, en sons, en commentaires,
- Rêvez votre film avant de le tourner.
Propos recueillis par V. A.
Pour en savoir +
> sur la formation « Le documentaire, du journalisme à la réalisation »
Pour en savoir + sur Joëlle Stechel :
Diplômée de l’ESJ Lille, Joëlle Stechel a débuté sa carrière de journaliste en presse écrite régionale et à la télévision (FR3, La 5). Elle réalise ses débuts dans le documentaire en 1991, en tant qu’auteur, journaliste et assistante de Daniel Karlin sur la série « L’hôpital d’Armentières ». S’en suit la réalisation de plusieurs magazines pour « La marche du siècle », « Faut pas rêver », « C’est pas normal », » L’œil et la main », « Tam Tam Job » et pour « Mezzo l’info ». A l’ESJ PRO, elle forme aujourd’hui des journalistes et apprentis journalistes à l’écriture sur images et au documentaire
Elle est l’auteur-réalisateur des 52’ suivants :
- A petits pas (La 3)
- Les ravaudeuses (KTO)
- Le sang de la vigne (la 3)
- Mon père ce héros (La 3)
- La parenthèse (La 3)
- L’échappée (Production « lis avec moi »)
- Deux ou trois choses que je sais d’eux (La 3)
- Esprit de corps (La 3)