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Développer la collaboration print-web : aux Editions de l’Avenir, le futur c’est maintenant !

Thierry Dupiereux © DR

17/05/2016 - L'actu d'ESJ Pro

« Si les journalistes mesurent bien l’intérêt d’être présent sur le numérique, il est parfois difficile pour eux d’y trouver concrètement leur place. » C’est ce constat qui a poussé Thierry Dupiereux, rédacteur en chef des éditions de L’Avenir, à faire appel à ESJ PRO.

 

Nous lui avons concocté un programme sur mesure, intitulé « Nouveaux formats, nouveaux réflexes : optimiser sa couverture de l’actualité sur tous les supports ».

 

Près de 150 journalistes – print et web – du quotidien belge ont participé à cet atelier de deux jours, à mi-chemin entre une formation et un séminaire. Seize groupes ont été formés dans un calendrier resserré de février à mai 2016.

Thierry Dupiereux témoigne du fort impact qu’a eu ce programme sur son équipe.

 

Qu’est-ce qui vous a poussé à lancer ce plan de formation de toute la rédaction ?

 

Thierry Dupiereux : Depuis plusieurs années, L’Avenir est présent sur le numérique. Le digital s’est peu à peu imposé comme une évidence à l’ensemble des membres de la rédaction. Les premières craintes de voir le papier « cannibalisé » par le web se sont estompées. Chacun comprend l’intérêt d’être présent sur le digital, sur les réseaux sociaux, mais parfois, il est difficile de trouver personnellement sa place. Pas par mauvaise volonté. Mais, pour des journalistes qui, par exemple, se sont investis dans le papier pendant des dizaines d’années, il est parfois compliqué de discerner les besoins et les réalités du web. D’autant plus que ces besoins et ces réalités ont des cycles d’évolution très rapides, beaucoup plus mouvants que pour le papier. Ce qui parfois décourage.

 

L’idée de ce plan de formation était donc de revenir à nos basiques sans se perdre dans des techniques du web trop pointues et fluctuantes. L’idée était plutôt « back to the basics », une information arrive dans la rédac, comment la traiter ? Comment la proposer à nos lecteurs, tant sur le web que sur le papier ? Comment la faire vivre dans le temps ? Comment donner envie à nos lecteurs l’envie de nous lire à tout moment de la journée ? L’idée n’était pas de transformer tous les journalistes en geeks, mais plutôt de stimuler leur imagination, d’aiguiser leur perception d’un journalisme moderne, dynamique, efficace tout en poursuivant un travail de fond fidèle à l’ADN de notre titre : proximité et crédibilité.

 

Comment arriver à rallier à un objectif commun des journalistes d’horizons, d’âges et de supports différents ?

 

Tout d’abord, justement, par l’exposé d’objectifs communs clairement identifiés. Par une ligne éditoriale partagée et non imposée. Mais aussi, par une formation comme celle organisée au sein de notre rédaction en ce début 2016. Deux jours d’échanges et de mises en commun pour chaque membre de la rédaction, animés par des professionnels qui ont une parfaite maîtrise des nouveaux réflexes à adopter dans un monde de l’information qui bouge sans cesse.

 

Ces formations n’ont pas été menées par service, tout le monde était mélangé, un rédacteur internet pouvait se retrouver aux côtés d’un fait-diversier, un localiste aux côtés d’un chroniqueur de politique nationale. Il était important que chacun se rende compte des réalités de l’autre. Il était aussi vital, pour moi, de faire circuler les bonnes idées qui parfois restent cantonnées dans un service. Il y a toujours à prendre dans les bonnes pratiques de l’autre.

 

En accord avec la rédaction en chef, il a été décidé de penser ce plan non comme de la formation – du cours magistral – mais comme un « séminaire », est-ce que cela fait une vraie différence ?

 

L’idée était que les participants soient aussi « formateurs », qu’ils apportent des idées, qu’ils construisent des scénarios en phase avec leurs réalités quotidiennes. C’est essentiel pour s’approprier l’info, y compris dans sa dimension multi-plateformes. Parce que ce qui fait la richesse d’une démarche journalistique, ce n’est pas l’utilisation de tel ou tel outil internet, c’est bien ce qu’on veut dire, ce qu’on veut exprimer, le choix des angles, le message essentiel. La forme doit être au service du fond et pas l’inverse. C’était valable pour l’écrit. C’est toujours valable pour le numérique.

 

Au sein d’une entreprise qui offre sur plusieurs plateformes une possibilité d’expression aux journalistes, il ne faut pas choisir, sacrifier l’un au profit de l’autre. Il faut jouer sur leurs forces respectives, sur leur impact auprès du public, sur leurs complémentarités.

 

Voyez-vous déjà des changements dans la production ou dans l’état d’esprit de vos équipes depuis que le programme a démarré ?

 

Premier élément notable, la formation a bénéficié d’un excellent retour de toute l’équipe. Le message est passé auprès de tous les membres de la rédaction. Elle a permis d’exposer les objectifs, clairement, sans tabou, si ce n’est celui des moyens. Je sais que c’est un peu bizarre, tant on parle de moyens au sein des entreprises de presse, mais si on veut conjuguer le fonctionnement de sa rédaction au futur, il faut le rêver. C’est après, seulement, qu’il faut faire le tri, choisir les bonnes idées qui ont germé, les dispositifs qui collent à la réalité, les scénarios qui permettent d’atteindre les objectifs.

 

Alors oui, certains ont plus « mordu » que d’autres, explorant davantage. Mais chacun, à son niveau, a appliqué des réflexes appris lors de ces formations, chacun en est ressorti avec la conviction que la pérennité de notre rédaction s’inscrit dans une réactivité et une créativité au service de l’info et des lecteurs. Chacun en considérant, aussi désormais, les différentes plateformes comme les maillons essentiels d’une déclinaison journalistique cohérente, utile, porteuse de sens et adaptée aux besoins cognitifs d’aujourd’hui.

 

Et pour les managers, est-ce que cela ouvre des perspectives ?

 

Bien sûr, une telle réflexion, ça stimule, mais il faut la prolonger sur le long terme, l’encadrer. C’est pour ça que j’envisage une formation supplémentaire avec les cadres afin d’accompagner ces nouveaux réflexes dans la durée. Il faut savoir que pour concocter cette formation, ces managers ont servi de cobayes. Ils ont suivi une première session “martyre” afin de l’affiner, de la rendre le plus proche possible de nos objectifs, de nos ambitions, de notre réalité. C’était très instructif et vivifiant. L’occasion aussi de débattre entre nous et de façon constructive d’un sujet riche qui n’en finit pas de nous remettre en question.

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